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L'expérience Kindergarten et troubles du comportement

 


Voilà plus de 6 mois que notre lionceau est entré en Kindergarten. Quel bilan retirons-nous de l'expérience à l'allemande ?



Un démarrage en dents de scie


En réalité l'année scolaire a été un peu amputée, car en Allemagne, les mesures sanitaires liées au Covid ont été renforcées dès la fin d'année 2020 et les écoles se sont vues fermées durant 8 semaines. Mais sur ce laps de temps de 6 mois cumulés, j'ai déjà suffisamment de choses à raconter !

Si au démarrage en septembre dernier, notre fils semblait heureux et fier d'aller à l'école comme les grands, son comportement s'est progressivement mis à changer au fil des semaines et nous avons été forcés de constater que le Kindergarten provoquait chez lui un grand stress.

Petit à petit, le lionceau s'est mis à trainer des pieds pour y aller, à avoir un comportement agité, même à la maison, à pousser/taper ses petits camarades à la moindre contrariété, à régresser sur le langage français (alors qu'il a toujours été en avance sur ce point). Il s'est même mis à avoir des comportements incompréhensibles, relevant presque du spectre autistique, au point où les maitresses nous ont suggéré d'aller consulter un spécialiste. Il mettait par exemple ses doigts dans la bouche à longueur de journée, il avait des "absences", des moments où il était complètement enfermé dans sa bulle, parlant dans son propre langage inventé, sans plus écouter ce qui se passait autour de lui et il était alors impossible de le ramener au présent, même pour nous. Ces moments se sont allongés pour devenir son état quotidien, et ainsi, il a commencé à s'isoler de ses autres petits camarades.

 

Nos tentatives d'explication


Est-ce du fait du mélange des âges ?

En quittant la Krippe (crèche) et en rejoignant la Kita (Kindergarten), notre fils est passé du statut de "plus grand des enfants" à celui de "plus petit". Sa place et son rôle se sont donc naturellement vus modifiés. Il s'est retrouvé confronté à des problématiques inédites et des réflexions de plus âgés avec quelques fois des approches très violentes (que même des enfants de 6 ans ne devraient pas avoir, mais bon...) comme le jour où un camarade lui a dit "je vais te tuer"... Ce à quoi il a innocemment demandé "ça veut dire quoi tuer ?"... "ça veut dire que t'es mort"... et BIM... magnifiques concepts à apprivoiser à 3 ans. Normal qu'il ait pu se sentir intimidé. Ajouté à cela, le fait qu'il n'avait plus "Bestiole" (son doudou et sa tétine qu'il était en droit d'obtenir à chaque moment de contrariété à la Krippe), ça a donné un cocktail de frustrations difficiles à gérer pour mon garçon hypersensible.


Est-ce du fait de la barrière de la langue et de la culture ?

La première grosse moitié de l'année, notre fils refusait catégoriquement de parler en Allemand, même de répéter les mots, ou de chanter les chansons, etc... Le fait est que ni mon mari ni moi ne parlons allemand à la maison. Comparé aux autres enfants bilingues de la classe, il partait donc fatalement avec un handicap sur ce point. La maitresse française nous avait expliqué que cela pouvait venir du fait qu'il semble très exigent avec lui-même : s'il se rend compte qu'il n'est pas capable de faire une chose parfaitement, il préfère ne rien faire (ceci est valable pour toutes les activités). Il faisait un vrai blocage. Il n'avait qu'une seule "amie" francophone (la fameuse Marie) et se retrouvait très souvent isolé des autres parce qu'incapable de les comprendre ou de se faire comprendre.


Est-ce de notre responsabilité ?

Avons-nous voulu lui imposer un modèle d'école qui ne lui correspondait pas ? Avons-nous manqué d'écoute ou de soutien ? Je savais pourtant que mon fils est un hypersensible, mais les précédentes expériences en crèche s'étaient si bien passées que je ne m'étais pas posé de questions avec ce nouveau changement. Au contraire, je pensais que ce modèle à l'allemande était le plus adapté pour lui. Sans doute ne l'avons-nous pas assez préparé ? Sans doute aussi, le cocon protecteur (et que j'essaie le plus bienveillant possible) que je mets autour de lui depuis toujours ne l'a pas aidé dans son chemin vers l'autonomisation. J'ai conscience de mon "mère-poulisme". Il a fallut en catastrophe lui apprendre à faire des choses seul (mettre ses chaussures, sa veste, etc...) pour ne pas qu'il se retrouve en décalage par rapport aux autres camarades de l'école et ne pas qu'il se sente frustré.
 

Est-ce de la responsabilité des enseignants ?

Pour moi la réponse est évidente : il y a une vraie grosse part de responsabilité des maîtresses, et je vais vous expliquer pourquoi.
Trop habituées à avoir des élèves en grande partie autonomes (rappelons que les âges en Kindergarten sont mélangés jusqu'à 6 ans, et qu'il n'y a réellement que 4 ou 5 "petits" de 3 ans sur toute la classe), elles faisaient comprendre sans arrêt à mon fils qu'il était "encore le dernier" à mettre ses chaussures, à se laver les mains, etc... pensant sans doute le motiver à apprendre à faire seul et plus vite (et s’exonérer d'avoir à le faire avec lui...). Une petite pression insidieuse que personnellement je trouve inutile. En inscrivant mon fils en Kita, je m'attendais plutôt à ce que les différences et rythmes de chaque enfant soient mieux respectés, et je suis un peu triste de constater que ce n'est pas forcément le cas (alors ok, je me base uniquement sur l'expérience avec ces maitresses-là et sur la dynamique et l'ambiance qu'elles ont insufflé au sein de leur groupe, cela ne s'applique pas forcément aux autres (du moins je l'espère)).
Pour vous raconter une anecdote savoureuse sur l'équipe d'encadrement de mon fils, un jour on m'a appelée en urgence car mon fils avait eu un "accident" de propreté et qu'on soupçonnait une gastro. Je me suis docilement rendue disponible dans le quart d'heure qui a suivi pour venir le chercher (merci le télétravail), et j'ai pu constater avec stupéfaction en arrivant sur place que personne n'avait daigné ne serait-ce que le changer ou le nettoyer vaguement. Il était exactement à l'endroit où il devait être au moment où on m'a appelée : debout, en pleurs, dans les toilettes, son pantalon souillé baissé, la porte de ses toilettes même pas fermée, sans aucune intimité et sans aucun soutien d'un adulte... J'ai trouvé cela tellement humiliant pour lui, j'en ai été tellement scandalisée, que je ne m'en suis pas cachée auprès des maitresses (qui se sont empressées de me renvoyer la faute plutôt que de se remettre en question : "s'il est malade il ne faut pas l'amener à l'école", "on n'a pas que ça à faire, on en a 25 autres à gérer", etc...). Bref, suite à ces incidents, et considérant que les maitresses ne faisaient rien pour aider mon fils à prendre part au groupe, nous avons demandé à la Directrice de changer notre fils de groupe. Malheureusement, on nous a répondu que ce n'était pas possible dans l'immédiat... (covid, question de places et de rythme de groupe, etc...). Mais au moins, à partir de ce moment là, cela a fait réagir les maîtresses qui, du coup, se sont enfin un peu plus concentrées sur le lionceau et lui ont donné un peu plus d'attention.

 

Comment la situation a-t-elle évoluée ?


Bref, sur la fin d'année 2020, nous avons vécu une période difficile et de grande anxiété pour notre garçon. Nous sommes passés par beaucoup de doutes et c'était pile au moment où je découvrais ma deuxième grossesse... J'en ai immédiatement conçu beaucoup d'appréhension (déjà que...), me disant que ce n'était pas le moment d'imposer un tel changement supplémentaire à mon fils alors qu'il était si mal, que j'étais une mauvaise mère, alors qu'il avait besoin de moi j'allais le priver de mon entière disponibilité, je mettais en péril tout l'équilibre familial, etc, etc...

Nous avions commencé à nous renseigner pour consulter une pédopsychiatre en France, et souhaitions l'avis de notre pédiatre à ce sujet. Mais tout compte fait, ce dernier, qui connait bien le lionceau pour le suivre depuis ses premiers jours, nous a beaucoup rassuré en nous disant que la réaction des maitresses était clairement disproportionnée. Il ne voyait aucun signe montrant le besoin de le faire consulter, et nous a expliqué que le comportement de notre petit garçon était tout à fait normal pour un enfant plongé dans un environnement culturel nouveau et une langue différente. En pareilles situations, certains enfants s'enferment même dans un mutisme du jour au lendemain. Il fallait donc juste lui laisser le temps de s'adapter et l'accompagner à persévérer en douceur.

Il se trouve que par un "heureux" coup du sort (il faut bien en retirer du positif), peu de temps après, le gouvernement allemand a décidé de fermer les écoles durant deux mois pour faire face à la recrudescence des cas de covid dans le pays. En deux mois à la maison, le lionceau a retrouvé son calme, les régressions et crises de colère ont totalement disparu, il est apparu plus reposé et serein. Il a découvert la venue prochaine d'un bébé dans la famille et s'est ainsi senti valorisé en tant que grand frère, ce qui a sans doute contribué à lui donner une confiance nouvelle en lui. Nous avons pu constater, comme à chaque fois qu'il est en autarcie avec nous (adeptes du unschooling, on se comprend), qu'il avait beaucoup progressé dans sa logique et la vivacité de ses arguments. Et ainsi, malgré nos appréhensions, lorsqu'il a repris l'école, tout est allé beaucoup mieux. Plus de crises, plus de larmes, il s'est lié d'amitié avec une énorme quantité de nouveaux copains et copines, il a même progressé d'un coup en allemand ! Désormais, c'est lui qui nous corrige lorsqu'on fait des erreurs de langue !

 

Renversement de situation


Lorsque nous avons revu le pédiatre pour faire le point, ce dernier a souhaité en profiter pour "tester" les capacités de notre petit garçon. Il l'a soumis à une série de tests logiques et de langage, de réflexions et compréhension, à la suite desquels il nous a livré sa conclusion : notre garçon est très en avance sur son âge et a les capacités cognitives d'un enfant qui entre au CP. Ceci peut expliquer le décalage qu'il peut parfois ressentir face aux autres enfants, sa maturité émotionnelle, elle, n'étant pas aussi avancée.

Il se trouve que notre pédiatre est lui-même allemand. Même s'il vit et exerce désormais en France et qu'il y a scolarisé ses enfants, il sait faire une analyse éclairée des deux systèmes. Après réflexions et discussions, il nous a convaincu que le modèle Kindergarten était finalement celui qui convenait le mieux à notre fils. En effet, dans une classe de maternelle à la française, le lionceau s'ennuierait et n'aurait pas accès à toutes les possibilités de s'enrichir qui existent en Allemagne.
Car il faut quand même relever le positif de la méthode à l'allemande : mon fils reçoit un programme varié qui s'adresse aussi bien aux plus petits qu'aux plus âgés du groupe. Ainsi, il apprend des choses qui ne sont (normalement) pas "de son âge" et accède à un cadre inédit dans lequel il joue beaucoup, est souvent dehors, a un rapport privilégié avec la nature, fait du jardinage, de la cuisine, de la menuiserie, de l'électricité, et tant d'autres activités qu'on retrouve rarement en France.

>> Lire aussi Le Kindergarten, un autre univers


Pour le bien de notre fils, je prends donc sur moi et tâche d'ignorer les maitresses, même si certaines de leurs réactions, y compris vis à vis d'autres enfants ou parents, me font bondir (pas plus tard que ce matin j'ai entendu la maitresse française dire à une collègue que ce n'était tout de même pas à elle d'aller accueillir un enfant (de son groupe) qui pleure dans le couloir, que la maman n'avait qu'à jouer son rôle...).
Nous avons confirmé auprès de la Directrice notre demande de changement de groupe qui devrait pouvoir s'opérer d'ici septembre prochain. D'ici là nous croisons les doigts pour qu'il n'y ait plus de situation difficile comme celle vécue en fin d'année.

 

 

 

 

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