Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
new-mum.over-blog.com

Lettre à la fille que je n'aurai jamais

 

Ma chère fille,


Viens près de moi, prenons 5 minutes toi et moi, tu veux bien ? Il y a des choses que j'ai besoin de te dire.

Tu sais, je t'ai rêvée toute ma vie. Je t'ai jouée et chérie maintes et maintes fois par le passé, au travers de mes poupées et autres jeux d'enfant. Mon avenir semblait impossible sans toi. J'ai toujours pensé que si je devenais mère un jour, ce serait grâce à toi. 

Lorsqu'une fois adulte j'ai été en essais bébé, je t'ai serrée de nombreuses fois contre moi en pensée et couverte de mille baisers imaginaires en t'attendant patiemment. 

Je pensais que ce n'était qu'une question de temps, jamais je n'ai douté que tu me rejoindrais un jour.

Et puis, ton premier frère est arrivé et ça a été le choc. Sans doute ai-je été un peu déçue, je dois bien le reconnaitre, de découvrir qu'il était un garçon. Ce n'était pas ce qui était prévu ! J'ai pensé "mais je ne sais pas comment aimer un petit garçon, moi !", car jamais je n'avais imaginé autre que toi, et que notre relation mère-fille.

Très vite, j'ai découvert avec ton frère ce qu'est l'amour maternel, et son incroyable démesure. Si j'avais soupçonné qu'il puisse-t-être si fort ! Il m'a eu par surprise, et j'ai compris qu'il avait toute sa place dans mon existence. 

Puis un deuxième bébé s'est invité dans nos vies. Même si, cette fois-ci, statistiquement, il y avait plus de probabilités que ce soit toi, j'avais le pressentiment au fond de moi, que notre rencontre n'allait pas se faire. Mes pressentiments m'ont donné raison, c'est ton second merveilleux frère qui est venu nous trouver. Même si j'étais plus sereine à cette découverte que la première fois - car désormais j'avais la preuve que je savais aimer un petit garçon aussi fort que je t'aurais aimée toi - il m'a fallut tout de même encaisser l'information. Car cette fois-ci, et j'en étais bien consciente, il allait falloir te dire au revoir pour de bon.

Tu sais, j'aurais été à tes côtés dans toutes les étapes et épreuves de ta vie. Je t'aurais accompagnée sur le chemin pour devenir une femme libre et heureuse, avec tout l'amour dont je suis capable. J'aurais tâché de te laisser l'espace suffisant pour grandir sereinement et faire tes expériences, mais malgré tout, je sais pertinemment aussi que j'aurais été un peu trop envahissante, surprotectrice. Ce monde est bien hostile pour une femme. J'aurais été angoissée à chaque fois que tu aurais été loin de moi, malade à l'idée de te laisser partir jouer chez d'autres, sur les dents dès lors qu'un inconnu t'aurait parlé. Je pense que je t'aurais transmis malgré moi ma méfiance des hommes et une partie de mes propres traumatismes et blessures d'enfance. 

Malgré tout, je sais que tu aurais été une petite fille forte et courageuse. Tu m'aurais émerveillée, fait rire, émue... Sans doute m'aurais-tu fait tourner en bourrique aussi, et sortir de mes gons plus d'une fois !
Nous aurions partagé une relation complice et fabuleuse tout au long de notre vie. On le dit "les garçons partent, les filles restent auprès de leur mère". C'était tout ce que je me souhaitais. J'avais imaginé avoir ainsi une douce compagnie pour la vie. C'est un peu égoïste au final, je m'en rends compte. Et puis c'est assez cliché, tu en conviendras ! 

Je crois que je projetais en fait sur toi ma propre relation mère/fille avec ta grand-mère. Quelque part, j'avais envie de transmettre cela, de faire vivre ce lien qui m'est si cher, par-delà le temps. 

Alors je sais aujourd'hui que nous ne nous rencontrerons jamais. Il m'aura fallu bien du temps pour l'accepter, pour faire le deuil de cette relation qui ne verra jamais le jour. Je crois que je n'ai pas encore tout à fait accepté d'ailleurs. Pour pouvoir passer à autre chose, j'ai besoin de t'écrire ces mots. Je ne pouvais pas te laisser partir sans te dire tout ce que j'avais sur le cœur. 

Ca ira pour moi. Je ne suis pas la maman que je pensais être, mais je connais suffisamment la vie maintenant pour savoir que quoi qu'il arrive, même si tu étais arrivée jusqu'à moi, je n'aurais pas été cette maman-là. Je suis merveilleusement bien entourée, tes frères me comblent de bonheur, prennent littéralement soin de mon âme. Merci de leur avoir laissé la place.

Pour toi, je garde une place unique dans un coin de mon cœur. Je vais tâcher de vivre avec moins d'amertume le manque de toi lorsque je vois les autres mamans dans leur relation avec leur fille.
Nous aussi on a notre relation. Une relation invisible, qui n'appartient qu'à nous, pour l'éternité.

Au revoir ma petite fille.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article