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Ras le bol - Quand la vie allemande me court sur le haricot

Je suis d'ordinaire toujours assez enthousiaste quant à ma vie en Allemagne et au système scolaire dans lequel sont plongés mes enfants. Il y a beaucoup de raisons de s'en extasier et j'ai déjà pu en parler auparavant. 

Et pourtant, il y a aussi plusieurs choses qui me heurtent en tant que française. Plus ça va, plus je découvre les travers de cet "idéal" de vie à l'allemande. Je vous en dis plus dans cet article...
 

 

La mère parfaite


J'ai déjà pu évoquer le sujet par le passé sur ce blog, il existe un sacré décalage culturel entre la France et l'Allemagne d'un point de vue de la maternité et parentalité notamment. Et cela commence pour les femmes dès la grossesse.

En France il est de bon ton de travailler le plus longtemps possible avant la naissance et de reprendre vite vite le travail après. Ainsi à l'issue du congé maternité de 10 semaines, rares sont les mères qui font une demande de congé parental. Et la question n'est pas seulement "culturelle" elle est aussi et surtout financière : peu de femmes peuvent se permettre de prendre un congé parental en France. 

En Allemagne, dès qu'elles apprennent leur grossesse, il est fréquent que les femmes demandent un mi-temps, voire un arrêt complet de leur activité. Si le congé officiel de maternité y est plus court qu'en France (8 semaines), il y a une différence majeure en Allemagne, qui réside dans le "Elternzeit", un congé parental d'une durée d'un an, rémunéré à 80% du salaire. Autant vous dire que 99,9% des mamans que j'ai pu croiser en Allemagne, demandent à bénéficier de ce Elternzeit durant la première année de vie de leur bébé (et elles auraient bien tord de s'en priver, j'aurais fait la même si j'avais pu). Cause ou conséquence de cet état d'esprit, il n'existe pas de structure d'accueil du tout petit enfant (moins d'un an) en Allemagne. Les rares mères qui souhaitent reprendre le travail doivent trouver des nourrisses, et celles-ci ne courent pas les rues. J'ai la chance de vivre à la frontière, et d'avoir pu inscrire mon petit dernier dans une structure franco-allemande qui dispose du personnel français formé pour l'accueil et le soin des nourrissons (on verra un peu plus bas que la question du "soin" du nourrisson est discutable) mais ce type de structure est rarissime.

Il n'est pas anecdotique que des mamans prolongent ensuite leur période de pause professionnelle jusqu'aux 3 ans, voire même quelques fois jusqu'aux 6 ans de l'enfant. Il ne s'agit alors plus d'un congé parental et cette période n'est donc plus rémunérée de la même manière, mais d'autres aides financières prennent le relais (l'équivalant de la CAF est bien plus généreux en Allemagne, et sans condition de ressources). De toute façon, tout est une question d'état d'esprit... Devenir mère en Allemagne est un choix, c'est une responsabilité qu'il faut honorer (pas étonnant qu'elles soient de moins en moins nombreuses à le vouloir comme l'indique le faible taux de natalité).

Ainsi, en Allemagne, si vous reprenez le travail avant les un an de votre enfant c'est que vous êtes vraiment une carriériste égoïste, doublée d'une mère indigne. Il existe même un terme pour cela : vous êtes une "Rabenmutter", une mère corbeau.
 

Ca y est ? Vous commencez à sentir un peu le poids des conventions sociales et des préjugés en Allemagne ou pas ?

Bien bien, alors on continue...


Mais attention, il ne suffit pas de rester "gentiment" à la maison durant une année. Les mères allemandes se doivent d'être irréprochables, et même hyperactives. Il faut qu'elles prouvent qu'elles utilisent ce temps à bon escient, dans le souci du bien-être et de l'épanouissement continu de leur enfant.
Ainsi, vous pouvez voir un peu partout dans la ville des mamans dignes d'un Desperate Housewives qui emmènent leurs enfants (à vélo cargo très souvent) au parc, dans la nature, et autres sorties culturelles, avant de passer au marché acheter quelques fruits et légumes bio pour pouvoir cuisiner des repas saints et équilibrés home made. Elles sont nombreuses à confectionner leurs propres vêtements de puériculture, liniment, savon, déco et autres jeux d'éveil en produits naturels. 

Elles se narrent leurs exploits et ceux de leurs petits lors des "Kindercafés" (lieux de rencontres dédiés mamans et enfants) et elles s'échangent ainsi de bonnes recettes et astuces pour un quotidien de mère au foyer épanouit.
Plus tard, ces mêmes mamans deviennent "Elternbeirat", parent d'élève (oui ok, je le suis aussi, mais ce n'était pas mon ambition au départ, souvenez-vous !!), où elles s'investissent corps et âme dans le choix des menus de la cantine, le droit pour leurs enfants d'apprendre à nouer leurs lacets à l'école (oui, c'est important) ou à pouvoir manger leur goûter (goûter fait maison bien sûr, on ne propose PAS de goûter industriel à son enfant) dans leur boite à goûter directement et non dans une assiette, parce que si tout est bien compartimenté, vous comprenez...

Elles organisent des tombolas et le brunch parfait du dimanche matin à la salle paroissiale, elles cousent à la main des trousses de soin, bavoirs et pots à couches assortis, en cadeau de naissance pour une enseignante qui vient d'accoucher...

Ceci sont TOUS des exemples véridiques issus de ma propre expérience et de mon groupe d'Elternbeirat, je n'invente rien.
 

 

Les soins aux enfants


Ce modèle de la mère omniprésente et parfaite est difficilement compatible avec ma vie de française active, vous vous en doutez bien. Je travaille à 80%, donc certes pas les mercredis, mais tous les autres jours de la semaine, je bosse de 9h à 17h30. Mon petit deuxième est en crèche 5j/7j depuis ses 4-5 mois (Bouuuuh Rabenmutter !), et il arrive parfois qu'il y reste jusque vers 18h30 le soir. Une situation IMPENSABLE pour une mère allemande. J'essuie trèèèèèès souvent des remarques et conseils (non demandés) de mamans et grand-mères outrées s'exclamant "Oh là là, mais c'est long pour lui" ou "Quelqu'un d'autre ne peut pas le chercher à votre place ?" ou encore, les mercredis lorsque je cherche mon ainé à son école : "Ah mais pourquoi vous n'allez pas d'abord chercher votre bébé avant de venir ?". Merci de vouloir réorganiser mes journées à ma place, mais ça va.


Est-ce que je ressens ce poids des préjugés et conventions sociales parce que je suis française ou bien est-ce que les mères allemandes aussi le ressentent ? Je me demande. 
 

Revenons-en aux soins prodigués aux petits. Je découvre depuis peu qu'en Allemagne, les encadrant(e)s des enfants dans les crèches et même en Kindergarten, n'ont pas le droit de donner de médicament à un enfant, quoi que vous puissiez vouloir y faire. Si votre enfant a par exemple de la fièvre, en attendant que vous puissiez venir le chercher, on ne pourra pas, comme on vous le proposera en France, lui administrer de Doliprane, et ce, même si vous prévoyez un mot du médecin ou que vous êtes prêt à signer tout les papiers d'autorisation possible. Pareil si votre enfant doit prendre un antibiotique : on ne fait pas ça en Allemagne.
Summum de l'indécence, qui confine pour moi à la maltraitance, on n'a pas le droit non plus d'administrer de la crème de change à un bébé qui a les fesses rouges écarlates, brûlées par l'acidité des selles. On préfèrera le laisser comme ça jusqu'au retour de la maman (qu'on culpabilisera surement de ne pas avoir réussi à se libérer plus tôt pour venir récupérer son enfant).
Pour essayer d'analyser la situation de mon point de vue, je pense que cette absurdité découle du fait que les professionnels allemands ne sont pas formés à la petite enfance et ne savent pas du tout comment faire. Une structure d'accueil préfère inscrire dans son règlement qu'on ne soigne personne, pour éviter tout problème. Car, après tout, en Allemagne, un enfant malade reste à la maison auprès de sa mère non ? Alors à quoi bon tout ça ??  


Mésaventure personnelle du moment (qui illustre le propos et explique pourquoi j'écris ça aujourd'hui) :

Mon petit dernier de 18 mois sort d'une bonne grosse semaine de maladie mais n'en a pas encore tout à fait fini avec son traitement. Mon pédiatre rédige donc un joli protocole de soin à suivre qu'il intitule "PAI" (projet d'accueil individualisé), que mon mari et moi signons et qui explique en gros qu'il faut mettre un antibiotique régulièrement dans l'œil de mon fils (qui souffre d'une malformation du canal lacrymal, donc c'est VRAIMENT important de suivre ce traitement pour éviter les surinfections et les risques de perte de vision). Jusque là rien de très compliqué me direz-vous ? Et pourtant, là où tout est OK pour les équipes françaises, la réponse est "Votre enfant est un enfant sous contrat allemand, or le protocole en Allemagne définit qu'on ne peut pas donner de médicament".  

S'ensuit un échange surréaliste avec l'équipe :

- (Moi) : Si le personnel allemand n'en a pas le droit, vous ne pouvez pas demander à une personne de l'équipe française de faire le soin du coup ? (l'avantage d'une structure mixte)
- Non vous êtes sous contrat allemand
-  ... Alors quoi, vous soignez les enfants français et les allemands vous les regardez crever ?
- Je suis d'accord que c'est mal fait, mais c'est comme ça en Allemagne, la règle c'est la règle. Vous pouvez peut-être venir lui administrer vous-même ? 
- Vous vous doutez bien que je ne vais pas venir toutes les heures ou même 2 heures (protocole : 1 goutte 4 à 8 fois dans la journée) juste pour mettre une goute dans l'œil de mon fils et repartir ensuite ?

Je vous passe la suite...

Si je le voulais, je pourrais sans doute alerter l'ARS et/ou la PMI pour dénoncer la situation. La crèche est située sur le territoire français, la législation qui s'impose est donc normalement la législation française... 🤷‍♀️ (Je ne suis pas certaine de ce que j’avance). Si un médecin donne un protocole médical à suivre pour la santé d'un enfant, comment une crèche peut-elle refuser de le suivre ?? Je ne parle même pas d'un traitement lourd en plus (je peux comprendre que dans certains cas il faille une formation du personnel), juste d'une goutte dans l'œil et juste pour 2 ou 3 jours encore. Que deviennent les enfants ayant des maladies plus lourdes à gérer ? 

>> EDIT a posteriori : j’ai eu une réponse de la Directrice allemande à ce sujet : ils refusent tout simplement l'inscription en crèche des enfants en question… « On n’est pas un hôpital » me dit-on. Voilà la réponse complètement hors propos. Double peine pour ces enfants isolés avec leur maladie. Je n’ai même pas osé demander comment ils gèrent le handicap des jeunes enfants. Mais on ne peut pas discuter, la crèche n'est pas obligatoire...

Il se trouve que baby lion va mieux, donc je ne vais pas perdre mon énergie là dessus, je me débrouillerai ce weekend pour terminer son traitement comme il se doit. Mais la situation est aussi absurde que scandaleuse, un jour ça pourrait avoir de grave répercutions.

 

L'entrée en école primaire


Dans un autre registre, mais toujours intimement lié au fonctionnement de la société allemande et aux valeurs qu'elle porte, nous sommes actuellement confrontés avec mon fils ainé à toute la lourdeur et au paradoxe du système scolaire allemand, entre souhait du bien-être absolu de l'enfant et pression à le faire entrer à tout prix dans les p'tites cases.

L'entrée en Grundschule ne se passe pas exactement comme nous l'avions pensé. Encensé d'un côté par ses maitresses actuelles mais jugé "hors clous" pour les enseignantes de la futur école, mon fils se retrouve au milieu d'un gros conflit dont nous tâchons de le préserver au mieux.

Je suis encore trop le nez dans la problématique pour le moment pour pouvoir vous en dire plus, mais je pourrai bientôt rédiger un nouvel article là dessus...

>> EDIT à posteriori : l'article en question

 

Bref, vous l'aurez compris, en ce moment j'ai un ras le bol des protocoles et particularités allemandes qui me rendent dingue... 

 

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Source image d'illustration : l'Eclaireur FNAC.

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